vendredi 11 août 2017

Lettres à Londres #2

Au mois d'août, j'écris des lettres à Londres, où j'ai pris mes quartiers pour un mois. Voici le deuxième lot, après le premier, que vous pouvez retrouver par ici.


VENDREDI 4 AOÛT

Aujourd'hui, j'ai cru que c'était un peu une histoire rien qu'entre toi et moi, que je t'avais pour moi toute seule, Londres. Il y a quelques jours, improvisant un changement de programme à cause de la pluie, j'étais entrée dans la National Gallery en plein milieu d'après-midi, plus vite que je n'avais eu le temps de refermer mon parapluie. Sans doute ai-je cru qu'il en serait ainsi pour tous les autres musées, que je pourrais réellement ne rien prévoir, prendre un métro, m'arrêter au hasard d'une station dont le nom inspire mon impulsion du moment, retrouver l'air libre, m'asseoir sur un banc et me dire Je vais où ? Aujourd'hui, ce banc n'était pas loin du Musée d'Histoire Naturelle. Il était 14 h 15, et j'ai décidé d'aller au musée. Comme des centaines d'autres personnes, qui m'ont rappelée que ce séjour ne pourrait pas se faire exclusivement au gré du vent. J'irai plus tard, un matin, au réveil, je serai la première dans la file, chiche.

SAMEDI 5 AOÛT

Je n'aurais probablement pas eu l'idée de regarder à nouveau Coup de foudre à Notting Hill ce soir si... Si je n'étais pas allée me balader sur les lieux de tournage, si je n'avais pas arpenté les allées du Portobello road Market, ne m'étais pas imprégnée de ses odeurs, ses tissus, ses fripes, ses boutiques d'antiquaires, si je n'avais pas poussé la porte du Notting Hill bookshop, hésité à frapper à la porte bleue de chez Max, laquelle est devenue noire. La librairie du film, spécialisée dans les livres de voyage, est devenue une boutique de souvenirs, pour les voyageurs, et j'ai eu un pincement au coeur.
Je reviendrai te voir au beau milieu de la semaine, Notting Hill, quand tes rues se seront vidées de l'effervescence du marché, car tu auras toujours un petit quelque chose de spécial pour moi, et je ne crois pas pouvoir me contenter de t'avoir (re)vu une seule fois.

DIMANCHE 6 AOÛT

Comme pour me protéger d'un possible mal du pays, Londres, ce mois d'août tu as eu la délicatesse de rebaptiser ton célèbre Covent Garden en Covent Jardin. Ce n'est pourtant pas pour faire le plein de culture française que j'ai eu envie de me balader dans ce quartier, aujourd'hui. C'est pour le charme de cet endroit historique, pour ces arcades si belles, cette grande verrière, ces artistes de rue, cette fantaisie qui t'est si propre. J'ai goûté une part de gâteau Chez Antoinette, bredouillant ma commande en anglais à une serveuse qui était sûrement française. A la radio chantait Julien Doré.
Devant le Palace Theatre, où se joue actuellement la pièce Harry Potter, je n'ai pas pu m'empêcher de prendre une photo, et de photographier aussi ce jeune homme qui, en me remerciant, me confiait dans un grand sourire : traveling alone sucks!, ce qui n'a pas manqué de me faire sourire en retour.

LUNDI  7 AOÛT

J'ai lu qu'il fallait vingt jours pour ancrer une habitude. Combien de temps faut-il pour se créer des habitudes dans tes rues, Londres ? Pour t'apprivoiser un tout petit peu, tourner instinctivement à gauche ou à droite, anticiper la rue suivante ? Pour réagir sans même avoir besoin de lever les yeux de son livre à l'écoute lointaine de son arrêt dans la rame de métro. Je commence à faire mienne la Northern line, ça s'est fait presque à mon insu, subrepticement. J'ai comme infusé dans tes couloirs de métro. Son jeu d'embranchements, de dédoublements, ne me joue plus des tours comme lorsque, les premiers jours, je m'engouffrais sans m'en préoccuper dans la première rame à quai. Il me semble que j'aurais si vite fait de me créer des habitudes dans ce quartier du Hampstead, si vite fait de ne plus jamais vouloir en partir, aussi.

MARDI 8 AOÛT

C'est la deuxième fois que je te regarde d'en haut, chère Londres. Surtout pas de haut, simplement d'en haut. Je voulais à nouveau monter le plus possible pour voir comme t'es belle, comme t'étais belle depuis le 35è étage du Sky Garden. Cette fois-ci je ne pouvais pas apercevoir Big Ben, ce Ben que je ne suis toujours pas allée voir, mais ce que tu m'as dévoilé n'était pas mal non plus, il faut bien le dire. Tout en bas, les blacks cabs circulaient comme des fourmis, tandis que tes bus rouges irriguaient tes rues, lilliputiens fabuleux.
En rentrant je me suis arrêtée faire quelques courses à l'épicerie, et j'ai savouré de ne pas devoir me demander si  ça valait le coup d'acheter une bouteille d'huile d'olive que je n'aurais assurément pas le temps de terminer. Du temps, j'en ai, à passer avec toi, alors petit à petit, la cuisine se remplit d'ingrédients et de bonnes choses. Je crois que je m'installe.

MERCREDI 9 AOÛT

Je t'avais vue venir, tu sais, toi et ta journée de pluie. Mercredi 9 août ne pouvait être qu'une journée passée au musée, entendant jusque l'eau qui dégoulinait sur le toit du Musée d'Histoire Naturelle. Cette fois-ci, bien qu'ayant échoué à arriver la première dans la file, j'attendais sous mon parapluie avant l'ouverture, lisant quelques pages d'un livre qui prenait piteusement l'eau autant que tout le reste. A l'intérieur, tu m'as inspirée, si tu savais comme tu m'as inspirée. Des idées de gravures à n'en plus finir, des broderies... J'ai photographié tous les animaux de la Terre, du crabe géant de Tasmanie au caribou, en passant par le pangolin africain. J'ai photographié, gribouillé, suis revenue sur mes pas pour noter quelque chose à nouveau. Tu as provoqué un tourbillon créatif en moi, et je n'aurai jamais assez de mes dix doigts pour faire naître des images autour de toutes celles que tu as mises dans ma tête. 

JEUDI 10 AOÛT

Ca m'a fait quelque chose de fouler le sol de la salle de bal de Buckingham Palace, aujourd'hui. De sentir le poids de l'histoire sous toutes ces dorures et ces apparats. J'ai imaginé les bals, les robes qui tournent, j'ai imaginé les banquets. Ca m'a fait quelque chose de poser pour la première fois les yeux sur les tableaux de la galerie royale... un Vermeer, ici ? Titien, par là ? De décrypter tous les cadeaux reçus par la reine à l'occasion de visites d'Etat, de sourire en l'imaginant accepter poliment cette paire d'immenses boucles d'oreilles trapézoïdales qu'étonnement on ne l'a jamais vue porter, ou bien encore cet arbre de vie mexicain personnalisé à son effigie, débordant de kitsch et de couleurs fluorescentes. Je me suis demandé où pouvait bien se cacher la reine, parmi les près de 300 chambres du palais, parmi ses 78 salles de bain. Je ne l'ai pas croisée, évidemment, mais j'ai suivi de près Nelson Monfort, visiteur parmi d'autres, comme moi ce matin. Nous portions tous les deux une veste bleue à coudières, et ça aussi ça m'a fait sourire. 
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2 commentaires:

  1. Ça me rappelle pleins de bon souvenir :) et je suis d'accord. Hampstead on pourrait vite y prendre ses habitudes et plus en partir :)
    Je n'avais pas fait le musée d'histoire naturelle honte à moi il faut vraiment que je le fasse :) bon et moi qui suis curieuse depuis que tu es la bas cas tu acheté de beau ? :)

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    1. Pas tellement de choses finalement. Je me sais très limitée par la contenance de ma valise, et je suis partie en oubliant que l'Eurostar restreignait le nombre de bagages à 2 (je pensais glisser tous mes achats dans un troisième sac au retour). Alors j'ai déjà des petites choses, des illustrations, surtout (c'est plat, ça se glisse facilement n'importe où), des... chaussettes, et pour le reste, j'ai dressé la liste de toutes les choses devant lesquelles j'ai hésité, et je retournerai ou non les chercher en fin de séjour, selon mon budget et la place dont je dispose, après avoir vérifié si je ne peux pas les retrouver sur internet. ;)

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